Si parfois Dimitri était le mec un peu lourd et dragueur qui ne savait pas s'arréter, c'était bien parce qu'il ne savait pas toujours ce qui plaisait. Ou, en fait, si, il savait très bien, mais il ne voulait pas user de toutes ses cartes pour des amourettes sans lendemain, et il gardait donc le grand jeu pour celles qui semblaient valoir la peine. C'était sans doute ce qu'il aurai tenté de faire avec Molly si la jeune femme n'était pas aussi imperméable à sa présence et ses paroles, un vrai bloc de glace qu'il avait peur de briser au lieu de faire fondre s'il avait le malheur d'agir en romantique. Il avait aussi peur de se faire briser, à vrai dire, n'ayant jamais du combattre autant pour se retenir et pour la conquérir. Si ces notes ne pâtissaient pas de cette nouvelle obsession, c'était bien parce qu'avec la clope, c'était la seule chose sur laquelle il pouvait se concentrer sans se perdre en pensées sur elle, encore et toujours.
Même sa petite histoire avec Amelia suite à leur baiser dans la grande salle ne tenait pas la comparaison. Elle était belle, Molly. Même énervée contre lui. Même en lui disant tout simplement qu'elle ne voulait plus voir, il ne pouvait pas s’empêcher de la trouver belle, et cela l’empêchait de voir que la partie était perdue. Hors de question qu'il ne la laisse s'enfuir, hors de question qu'il abandonne. Il ne pouvait pas, il ne voulait pas. Il était certain d'avoir réussi à lui faire ressentir quelque chose, il ne pouvait pas être le seul à sentir cette... étincelle, non ? Et il était certain qu'elle avait failli succomber lors de leur petite discussion au bord du lac. Il avait vu d'elle une facette dont il était sur qu'ils étaient une poignée à connaître l'existence...

C'était pour ça, pour la Molly un peu perdue et fragile qu'il avait apercue, qu'il s'était levé pour l'attraper, pour lui dire ce qu'il pensait, ce qu'il voulait. Sans le dire, à demi mots, mais il ne pouvait pas non plus se voiler la face en pensant qu'elle ne lui rirait pas au nez si jamais il lui avouait qu'il l'aimait. Les déclarations directes n'étaient pas une solution, et il ne savait pas vraiment les faire, aussi. Mais il voulait une seconde chance. Il voulait qu'elle arrête de le voir comme un dragueur inconstant, qu'elle lui fasse confiance, qu'elle se confie à lui, il voulait la connaître de fond en comble et pouvoir être un support auquel elle se raccrocherait en cas de besoin. Même si c'était une demoiselle très autonome, personne ne pouvait survivre sans parfois demander de l'aide, et il voulait être cette personne pour elle. Sans la juger, sans la presser, juste être là. Il n'y pouvait rien s'il ressentait un besoin de la protéger, si elle éveillait en lui une possessivité pareille, mais il n'allait pas s'effacer et la laisser maintenir entre eux cette barrière simplement parce qu'elle le croyait joueur.
Il voulait la percer à jour et arrêter de jouer à l'ami innocent, mais il fallait déjà qu'elle ne le considère pas comme un inconnu. Et s'il devait en passer par là... Il ferait tout et n'importe quoi. À vrai dire, il n'était plus à ça près, non ?

Cherchant à croiser son regard, amer et blessé qu'elle ne montre pas d'émotions positives en sa présence, devant se contenter de ses moues et soupirs qui ne l'aidaient pas du tout à se calmer, il fut donc surpris de la voir soudain relever les yeux et lui parler.
Hu ?! Sa phrase n'avait aucun rapport avec l'affaire en cours, du moins, il le pensait, mais après la discussion qu'ils venaient d'avoir – ou plutôt le dialogue de sourds – il ne pouvait plus faire confiance à ce qu'il pensait d'elle. Pourquoi lui demander si la serveuse lui plaisait ? Il sentait le piège, mais ne comprenait pas en quoi cela changerait les choses. Cependant, le ton de Molly lui faisait comprendre qu'il n'allait pas s'en tirer avec une pirouette et que sa réponse était importante. Réfléchis, Dimitri ? Non. Ce n'était pas le genre de choses où il fallait prendre le temps de considérer, il savait bien qu'il était en mauvaise position et que la faire poireauter n'aurait aucun effet positif sur la suite de leur relation.
Aussi, jetant un coup d'oeil à la serveuse incriminée par dessus son épaule en vitesse, il se retourna à nouveau vers Molly, le regard perçant pour chercher à comprendre, honnête.

« Non. »

Un non qui voulait dire qu'elle ne valait pas une mornille face à Molly, qu'il ne reluquait pas les filles dans la rue alors qu'il ne les connaissaient ni d'Eve ni d'Adam, et qu'il ne faisait absolument pas une généralité de coucher avec des serveuses de bars. Un non dont il espérait qu'elle se satisferait, parce qu'il ne savait plus quoi faire d'autre pour changer les choses entre eux.